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Le Phénomène de la Cancel Culture est-il un danger pour notre société ?

Rarement dans l’histoire de notre société l’espèce humaine a eu à traverser autant de défis. Pourtant de nombreuses crises ont impacté la société Française au cours du dernier siècle; les pandémies (la grippe espagnole, la grippe asiatique ou même la récente grippe de Hongkong), les deux guerres mondiales du XXème siècle et depuis maintenant presque 30 ans, celle menée contre le terrorisme.

Alors que la crise mondiale du coronavirus nous frappe aujourd’hui, la guerre du terrorisme est encore bien présente, et il est apparu ces dernières années un phénomène sociétal inquiétant, appelé « Cancel culture » dont l’ampleur rend notre époque certainement unique.

Celle-ci, initialement animée par des petites communautés, regroupe maintenant un grand nombre d’adeptes et fait peser un vrai danger sur nos sociétés.

 

La « Cancel culture », qu’est ce que c’est ?

La Cancel culture est un phénomène en provenance des Etats-Unis. Il s’est petit à petit développé en Europe et se trouve décuplé par les médias sociaux qui en sont la principale source applicative.

Elle se concrétise par le bannissement ou par des actions qui consistent à bloquer une personne des réseaux sociaux car ses opinions ne nous plaisent pas. Une extension de ce phénomène passe aussi par la dénonciation ou le lynchage en ligne consistant à dénoncer publiquement, en vue de leur ostracisation, les individus ou les groupes responsables d’actions ou de comportements perçus comme problématiques.

C’est bien cette logique, attaques personnelles et usages intempestifs des réseaux sociaux, qui est au cœur de la Cancel Culture. De manière paradoxale, sous couvert de « libérer la parole » cette dernière s’éloigne de la liberté d’expression. Cette Culture ne tolère nul débat autre que l’adhésion tout en ouvrant la porte à la délation et à l’ostracisation.

Ce qui nous interpelle ; comment on en est arrivé là en France, pays des lumières dont sont issue Rousseau, Diderot, Montaigne, Voltaire, Montesquieu, D’Alembert et bien d’autres qui les ont précédés comme Descartes ou Pascal.

A y regarder de plus près, tous ces grands penseurs, fondateurs en grande partie de la pensée française encourageaient la science et la connaissance et s’opposaient à l’obscurantisme de leur temps. La révolution industrielle, au cours du XIXème et XXème siècle a engendré une grande quantité de chercheurs et de scientifiques dans tous les domaines ; pour en citer quelques-uns, mathématiciens (Cauchy, Poincaré…), médecins (Paré, Bernard…), physiciens (Pascal, Ampère,…), chimistes (Lavoisier, Curie…), naturalistes (Buffon…), biologistes (Pasteur…) mais nombre d’entre eux sont bien évidemment un mélange de tout cela comme Pierre et Marie Curie pour ne citer qu’eux.

Et sans compter la multitude des grands écrivains et poètes Français.

 

Alors, comment en plus de trois siècles d’élites intellectuelles, on a pu niveler la pensée vers le bas à ce point ?

Ce phénomène est certainement en grande partie lié à la rupture provoquée par l’apparition des réseaux sociaux et aussi à la plus grande liberté d’expression de chaque personne.

Ils ont notamment permis, pendant la campagne du candidat Obama de mener des actions au plus proche des gens et de faire gagner la présentielle Américaine en novembre 2008.

Les réseaux sociaux étaient passés tout d’un coup, d’un outil communautaire ou groupusculaire à un outil d’influence nationale permettant de gagner les élections.

Les réseaux sociaux ont précipité ou déclenché ce phénomène en colportant notamment des fake news et en alimentant les théories du complot et ainsi favorisant l’émergence de quelques groupes d’influence sur la toile, qui ont notamment aidé ou permis le vote du Brexit ou l’élection de D. Trump. Ce dernier a d’ailleurs été un des grands acteurs de cette Cancel culture par son utilisation compulsive des réseaux sociaux, en particulier Twitter, pour colporter informations fausses et contradictoires.

Autre facteur aggravant de la Cancel culture vient aussi de certains mouvements communautaires religieux ou complotistes ont bien compris quels avantages ils pouvaient tirer de ces nouvelles technologies pour développer des dérives sectaires et donc à favoriser leurs politiques visant à promouvoir l’obscurantisme.

Ce phénomène semble aujourd’hui gagner nos universités (en rupture avec la société) avec un mouvement cherchant à nier ou à revisiter l’histoire à l’aune de notre présent  A titre d’exemple, de grandes écoles de commerces dont une notamment qui n’a pas hésité à boycotter une conférence sur Napoléon Bonaparte car le personnage ne plaisait pas aux étudiant. Mais Napoléon est et restera un personnage clé de notre histoire.

Tout ceci se fait sur un mouvement de fond où tout doit être vu, compris, analysé avec la connaissance du présent, rejetant l’histoire à un passé qu’il faut oublier. C’est la dictature de l’opinion face aux savoirs et à l’histoire.

Et dans ce mouvement, ceux qui se font le plus entendre, car ils font le plus de bruit, ne sont certainement pas non plus les plus démocrates, quoiqu’ils en disent.

 

Notre société est-elle comme nos smartphones, c’est à dire programmée pour basculer dans l’obsolescence ?

Tous les signaux sont au rouge pour l’obsolescence programmée de nos savoirs et de nos connaissances au profit de groupes d’opinions, qui, en revisitant l’histoire, les savoirs ou tout simplement la réalité, manipulent l’opinion à leurs profits. Ces méthodes de propagande, autrefois uniquement utilisées par les Etats autoritaires, sont aujourd’hui à la portée de tous. Et les extrémistes de tous bords, notamment religieux, l’ont bien compris.

Ce fléau (mondial) trouve aussi ses origines dans l’appauvrissement de l’éducation, en particulier en France. Notre système éducatif Français, est lui-même devenue un terrain fertile à ce phénomène de la cancel culture par son très mauvais niveau global de formation comme le confirme le dernier classement Pisa (1).

Il y est clairement stipulé que notre système en plus d’être moyen est très inégalitaire, notamment entre établissements privés et publics tant au niveau de la qualité de l’instruction que du budget, il favorise en particulier le nivellement par le bas par son choix de l’obtention de diplômes à tout prix pour tous comme l’est aujourd’hui le BAC.

De plus, le système éducatif, ne remplit plus sa mission première de fournir une culture générale suffisante afin d’avoir les clés de compréhension du monde. Ces manquements ont des conséquences tragiques quand tout un chacun se retrouve face à la multitude des contenus sur Internet, du meilleur jusqu’au plus pervers. Le fameux « apprendre à apprendre » si cher à François Taddeï et sa société apprenante.

 

Investir massivement dans l’éducation et la culture

Une partie de la solution se trouve certainement dans le renforcement budgétaire de deux ministères celui de l’éducation nationale et celui de la culture et de la communication, qu’il faudrait mettre sur un même pied d’égalité. Mais aussi par une refonte totale des programmes enseignés aux élèves qui étaient certes adaptés, au siècle dernier avec un sachant qui distribuait son savoir à ses élèves. Maintenant, avec le numérique, Internet et les réseaux nous savons que les sources du développement des savoirs seront multiples et hybrides.

Il est nécessaire, dès le plus jeune âge, et tout au long de la vie, de former les enfants et les jeunes à apprendre à apprendre, à décrypter et à déchiffrer le vrai du faux afin que chacun puisse développer son esprit critique autant que son libre arbitre et sa liberté d’opinion avec un « couteau suisse numérique » permettant une éducation augmentée (2).

C’est à ce prix que nous gagnerons la bataille de la Cancel culture et que les français reprendront confiance par exemple en la science qu’ils ont perdu durant cette période du Covid19 (3).

Encore un nouveau challenge pour cette génération si durement frappée dans sa vie en 2020

 

Conclusion

Pour finir et apporter de la légèreté en ce début d’année, nous terminerons par deux citations d’auteurs et de films : « l’ignorance entraine le chaos, pas la connaissance » Lucy de Luc Besson, et celle de l’auteur Charles Bukowski : « le problème en ce monde est que les personnes intelligentes sont pleines de doutes, tandis que les personnes stupides sont pleines de confiance ».

N’ayons plus peur de douter de faire usage de votre curiosité, qui est loin d’être un vilain défaut, de lire, de visiter des musées et autres patrimoines, d’élever nos capacités intellectuelles et culturelles, de devenir des individus jouissant d’une multitudes de compétences, pousser le curseur de vos aptitudes cognitifs plus haut. Acceptons d’échanger avec des personnes qui n’ont pas le même opinion que soi et d’apprendre mutuellement.

N’oublions jamais que sortir de sa zone de confort ne veut pas forcement systématiquement dire voyager physiquement, où faire de nouvelles expériences, non ça commence par lire des nouveaux livres, car oui après tout la littérature n’est-elle pas un voyage à elle seule ?!

Il ne faut pas oublier que les bibliothèques sont souvent les meilleurs endroits pour s’auto-former et se former tout court, profitez aussi pour suivre quelques MOOC nous vous recommandons ceux du Collège de France ils sont parfaits, car à partir de maintenant il en va de la survie de la pensée de notre espère humaine.

Comme on dit au restaurant « bonne dégustation » dès que les restrictions accès et de mouvement seront levés.

Clémence de Lambert | Linkedin
Philippe Rouger 


(1)  https://www.la-croix.com/Famille/Education/Etude-Pisa-Francais-eleves-moyens-systeme-inegalitaire-2019-12-03-1201064155

(2)  https://www.lopinion.fr/edition/economie/education-augmentee-chronique-david-lacombled-229319

(3)  https://www.institutsapiens.fr/la-defiance-des-francais-envers-la-science/

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