Le week-end du 15 février 2019 a lieu le NBA All-Star Weekend à Charlotte, en Caroline du Nord. Archétype du sport business et du show à l’américaine, cet événement est attendu par plus de 7 millions de téléspectateurs aux Etats-Unis et sera disponible sur BeIn Sports en France.
Création du « All Star Game » de basket en NBA
Avant de se lancer sur les éléments sportifs, économiques et sociétaux de l’événement, rappelons tout bonnement ce qu’est le All Star Game.
Née en 1951, cette rencontre au sommet oppose chaque année les meilleurs joueurs de la NBA, prestigieuse ligue américaine de basket-ball. A l’origine, c’est le directeur publicité de la NBA, Haskell Cohen qui soumet l’idée au président de la Ligue qu’était Maurice Podoloff. Sceptique, ce dernier ne se laisse pas convaincre par Cohen.
A ce moment-là, la NBA est loin des droits TV faramineux et des montants monstrueux des contrats que nous connaissons aujourd’hui.
Créée en 1946, soit cinq ans plus tôt, elle peine à remplir les salles et l’affluence moyenne avoisine les 3500 spectateurs.
C’est alors que le patron des Celtics de Boston, franchise emblématique du basket américain, flaire la bonne occasion. Persuadé que le All-Star Game sera une plus-value pour son business, Walter Brown propose à Maurice Podoloff d’accueillir l’événement dans sa salle du Boston Garden.
Plus encore, il s’engage à rembourser les frais d’organisation à la NBA en cas de pertes en marge de l’événement …
Plus d’un demi-siècle s’est écoulé et le All-Star Game ne ressemble en rien à cette folle idée qui ne parvenait pas à convaincre le propre président de la NBA.
En 2018, son impact économique dépasse les 116 millions de $, rien que pour le comté de Los Angeles, ville hôte de l’édition.
La planète basket-ball en effervescence le temps d’un week-end
Du vendredi au dimanche soir, le monde du basket-ball vit au rythme des animations All-Stars. Le vendredi, le match des célébrités, très important pour faire connaître l’événement au grand public, et le Rising Stars Challenge, match des jeunes joueurs entre la Team World et la Team USA, assurent le show. Puis le niveau monte en pression dès le samedi, jour des concours. On peut s’y délecter du concours de talents, qui récompensent le plus juste passeur, dribbleur et tireur. Ensuite a lieu le concours du tirs à 3 points où huit gâchettes tentent chacun 25 tirs pour se hisser en finale. Enfin, le Slam Dunk Contest, fournisseur officiel de frissons et qui a fait la légende de Michael Jordan, cloue le spectacle. Des paniers spectaculaires réalisés par de réels acrobates font se lever toute la foule et rend les juges hystériques
Profitez d’un petit avant-goût ci-dessous :
Le dimanche est entièrement consacré au All-Star Game, point fort du All-Star Weekend. Historiquement, ce sont les douze meilleurs joueurs de chaque conférence, selon fans, journalistes et entraîneurs, qui s’affrontent. Mais le format a changé depuis l’an dernier, et vous est expliqué plus bas.
L’aspect spectaculaire et très axé sur le visuel du basket-ball américain se marie bien avec l’interactivité sur les réseaux sociaux. Ainsi, meilleures actions, ralentis ou images insolites de joueurs NBA font rapidement le tour des Facebook, Instagram et Twitter. D’après l’étude Turner Sports, les vidéos concernant l’ASG 2018 ont connu une forte hausse de 37% comparées à celles de l’édition 2017. Cette évolution s’explique notamment par la tempête Twitter qu’a causée la contre-performance de la chanteuse Fergie, interprète de l’hymne américain …
Aux Etats-Unis, l’audience télévisée stagne. Mais la simultanéité avec les Jeux Olympiques d’hiver 2018 est gage d’espoir pour Adam Silver et la NBA. Diffusé sur TNT pour la 16e année consécutive, le match du dimanche réunissait en moyenne 7.7 millions de téléspectateurs aux Etats-Unis. Cela représentait 5.1% des parts de marché, soit 1.4 points de pourcentage en-dessous du All-Star Game de baseball, disponible sur FOX.
C’était également le deuxième pire résultat d’audience de la décennie 2010, ce qui s’explique par l’essoufflement de l’ancien modèle du match dont la marque est encore présente dans les têtes américaines.
Afin de mieux situer l’impact du All-Star Weekend à la télévision américaine, on note sur le graphique ci-dessous qu’il s’est fait une place dans le calendrier annuel de la Ligue. D’après une étude réalisée par Statista, en 2017, le All-Star Game réunit 7.8 millions de téléspectateurs en moyenne. C’est presque trois fois moins que l’audience moyenne des Finales NBA de la même année (20,5 millions) et 1 million de téléspectateurs en moins comparé au match du Christmas Day 2017 (8,8 millions).
Le site américain Sports Media Watch soulève par cette étude une tendance intéressante. En 1993, à la grande époque de Michael Jordan, presque 23 millions d’Américains contemplaient les exploits des superstars de la NBA lors du All-Star Game. C’est une audience plus de trois fois supérieure à celle de 2018, causée par un essoufflement du concept “Ouest contre Est”.
Un enjeu primordial pour les sponsors
Pour l’édition 2018, ce sont pas moins de 27 sponsors qui ont acheté des espaces à la NBA. Allant de l’équipementier maillot (Nike) aux boissons alcoolisées (Jack Daniel’s ou Budweiser), les marques se bousculent au portillon pour placer leur nom au cours de l’événement et ainsi profiter de la visibilité du All-Star Game pendant tout un week-end.
C’est le moment pour les grandes firmes, surtout agro-alimentaires, d’affirmer leur autorité sur le marché américain, mais également de renforcer leur image de marque à l’échelle planétaire. Ainsi, chaque sous-événement du All-Star Weekend est présenté par une marque, à l’exception du All-Star Game, qui garde son appellation vierge de tout sponsor.
On profitera notamment du concours de dunk AT&T, du concours de skills Taco Bell, et cela pendant la State Farm Saturday Night.
La (r)évolution toute fraîche des règles du All-Star Game
Depuis plusieurs années, les amateurs de basket dénoncent le manque d’intensité affiché par les joueurs pendant le match des étoiles. La NBA a tendance à privilégier le spectacle au basket fondamental. Or, si les concours de dunks ou de tirs à 3-points sont présents, c’est pour remplir la partie spectaculaire. Ce que voulaient les fans pour le All-Star Game, c’est un vrai match engagé et où les deux équipes aspirent au succès et non une exhibition ponctuée d’oublis défensifs.
Dans les années 1980-90, les rencontres étaient rythmées par les oppositions entre compétiteurs acharnés. La conférence Est de Michael Jordan et Larry Bird tenait à s’imposer face à l’Ouest de Magic Johnson et Hakeem Olajuwon. Des stars qui portaient leurs franchises à bout de bras et n’entendaient pas s’incliner face aux rivaux, notamment pour marquer les esprits dans la course au titre de MVP, ou meilleur joueur de la saison.
La décennie actuelle est celle des SuperTeams. De points de vue sportifs et commerciaux, l’addition de superstars sous le même maillot amène du positif pour l’équipe qui les réunit.
Pour redonner du piquant à cette rencontre au sommet, le commissionnaire de la NBA Adam Silver a orchestré la transformation du concept. Fini les oppositions entre conférences, les joueurs choisissent désormais leur équipe. Ou plutôt, le joueur ayant reçu le plus de votes dans chaque conférence (deux au total), bâtit son équipe, à l’image des matchs de cour de récréation. La Draft effectuée par les deux capitaines était d’ailleurs télévisée sur TNT aux States, et BeIn en France ce jeudi 7 février.
Ce format, loué par les fans et les joueurs eux-mêmes, s’est avéré convaincant. Les athlètes qui sont donc regroupés par affinité au début, puis par stratégie, veulent à tout prix s’imposer. On semble peu à peu retrouver la ferveur qui emplissait l’atmosphère au temps de Jordan et Magic…
Cette année, les votes des fans étaient organisés par Google, ce qui a provoqué une explosion du nombre de votes reçus. En effet, après 3 semaines de votes, les 40 joueurs plébiscités par les votants rassemblaient plus de 53 millions de votes. L’an dernier, seulement 20 millions de votes étaient comptabilisés trois semaines après l’ouverture des suffrages.
Un écart abyssal dans les résultats qui met en lumière la réussite du partenariat entre la NBA et le moteur de recherche Google.
Par ailleurs, une autre innovation est de mise pour 2019. Pour contenter les fans des années 2000, les futurs admis au Panthéon de la NBA, l’Américain Dwyane Wade et l’Allemand Dirk Nowitzki sont invités d’honneur du match des étoiles. Un geste évidemment plébiscité par tout le public de la Ligue.
Conclusion et Perspectives d’avenir
La vitesse avec laquelle évolue la sphère All-Star Game laisse présager toujours plus de démesure dans les résultats sportifs, cotés points notamment. Ce show « made in USA » peine à rayonner voir s’exporter en dehors des « pro-fans ». Quels perspective d’avenir pourrions nous imaginer pour le désenclaver ?
1° Sortie des USA ?
On sait que la NBA n’a jamais caché son souhait de s’exporter en Europe et en Asie. Elle le fait déjà pour des tournées ou matchs de pré-saison. Et pourquoi pas voir délocaliser ce All-Star Game dans une ville telle que Paris voire Pekin ? Faisant de ce « produit NBA » un étendard à l’export.
Permettant à terme de faire sortir la NBA de la « nationalisation » en implantant une de ses franchises en dehors des Etats-Unis, pour contenter les fans de basket-ball qui sont plus nombreux dans le monde chaque jour. Imaginons : Les « Shanghaï Sharks », les « London Lords » ou bien les « Tokyo Dragons » … voilà quelques noms d’équipes qui pourraient leur seoir à merveille.
2° De l’intéraction via les réseaux sociaux à l’inclusion via la Réalité Augmentée?
De plus, les fans – grâce aux réseaux sociaux – sont ultra réactifs année après année. La NBA devrait saisir cet opportunité de marché et améliorer l’interactivité durant tout ce week-end, afin que les spectateurs ne soient jamais déconnectés de ce show de « basket-ball ». Miser sur les #reseauxsociaux pour exemple, cette année, chaque joueur a son « emoji représentatif » de sa personnalité, grâce au hashtag correspondant.
Outre le phénomène de starification clairement enclenché, l’événement se passe autant sur le parquet que sur les réseaux ou les interactions, partage et tweets sont autant de rigueur que les “achats de pop-corn et autres sodas associés”.
A l’avenir, les technologies avancées seront capable de faire vivre l’événement en live grâce à des casques de « réalitée augmentée ». Le spectacteur « non physiquement présent pourra vivre en « immersion live » depuis tout point du globe, directement depuis la salle des festivités qu’elle soit sur le sol américain ou autre, une expérience unique. Augmentant le nombre de fans, développant des ressources pour une nouvelle économie du spectacle, au plus proche du spectacle.
3° Le vote des équipes réalisé par une Intelligence Artificielle ?
Les votes des fans pourrait être notamment changer par l’arrivée d’une intelligence artificielle qui prendrait en compte un panel de statistiques (points, rebonds, passes, contres, interceptions … mais aussi impact brut dans le jeu) permettant d’assurer les compositions d’équipes assurant le meilleur des « shows » possible. La sélections des joueurs n’en serait que plus juste, et personne ne questionnerait l’objectivité des votants comme tous les ans.
4° vers un All Star Game mixte ?
Enfin, un point nous tient particulièrement à coeur. Il s’agit de la mixité des genres au travers du basket-ball.
Des grands sports américains (Foot Américain, Base-ball, Basket-ball, Hockey…), le sport à la balle orange a le plus développé sa ligue féminine.
En guise de comparaison, la page Facebook de la WNBA, ligue féminine de basket américain compte 1,1 millions de fans quand celle de Hockey regroupe « que » 53 mille fans sur Facebook. Foot américain et Baseball n’ont même pas de ligue féminine professionnelle.
Signe d’un « tout petit » début d’intégration, 4 femmes ont intégrés les bancs de la NBA dont « Becky Hammon »: assistant coach depusi 2014 aux Spurs de San Antonio, … et cette année – signe des temps – les 2 coachs du matchs des « célébrités » sont des coachs féminins issues des meilleurs équipes de WNBA, mais il faut aller encore plus loin …
… et faire de cette idée, une occasion « unique » permettant d’arriver à un All-Star weekend placé sous le signe de la mixité : on aimerait voir les concours de dunks par duo mixte, les concours à 3 points et de skills théâtres d’affrontements entre hommes et femmes mélangés, voir l’intégration de joueuses dans les 2 équipes. Il est important de travailler sur ce point, et ainsi amener la WNBA sur le devant de la scène au cours d’un week-end uniquement centré sur le basket américain.
La Leaders Cup française, qui se déroule exactement les mêmes jours que le ASG profitera-t-elle de l’impact médiatique du ASG ou en sera-t-elle plutôt victime ? Entre les 15 et 17 février, il vaudra mieux ne pas détester la balle orange car elle sera présente sur tous les écrans, que ce soit en France ou dans le monde entier.
Valentin Nonorgue
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